Judenfrei

La grande synagogue de Bydgoszcz en Pologne occupée. L'inscription indique : « Cette ville est libre de Juifs. »

Judenfrei [ˈjuːdˌfʁaɪ] est un terme allemand employé sous le Troisième Reich, pendant la Shoah, pour signifier qu'un endroit est « libre de Juifs », par exécution ou par déportation. Sa première apparition remonte à la fin du XIXe siècle en Allemagne.

L'adjectif judenrein [ˈjuːdˌʁaɪn], d'un sens comparable, a une résonance plus forte : il veut dire qu'une ville ou un pays, dans l'Europe sous domination nazie, est « nettoyé de ses Juifs ».

Ainsi le Luxembourg est-il déclaré judenfrei par la propagande nazie le , tout comme le territoire de Babrouïsk trois semaines plus tard, après les massacres et la liquidation du ghetto au mois de novembre. L'Alsace et la ville de Berlin sont quant à elles déclarées judenrein.

Origine

Cette terminologie apparaît pour la première fois à la fin du XIXe siècle sous la plume du pamphlétaire antisémite Theodor Fritsch, fondateur du Germanenorden, qui prône l'avènement d'une Allemagne « sans Juifs ». Fritsch l'emploie en 1888 dans le Centralorgan der deutschen Antisemiten pour appeler à la création d'un théâtre sans participation juive. Peu après, face à l'expansion du Bäder Antisemitismus, l'hebdomadaire politique Die Welt (Herzl) (en) fondé par Theodor Herzl publie en 1899 un article intitulé Die erste Liste der Judenfreien Sommerfrischen ist soeben erschienen (« La première liste des villégiatures d'été sans Juifs vient de paraître »)[1].

Lieux déclarés judenfrei ou judenrein

Carte adressée par Stahlecker à Heydrich le pour illustrer l'avancée de l'Einsatzgruppe A en Estonie (judenfrei), Lettonie, Lituanie, Biélorussie et Russie. Au centre de chaque pays, le nombre de Juifs assassinés est indiqué à côté d'un cercueil. En bas du document, une phrase signale que 128 000 sont encore en vie.
  • Gelnhausen (Allemagne), judenfrei le , après la fermeture de la synagogue et l'expulsion de la communauté juive.
  • Bydgoszcz (Pologne), judenfrei en .
  • L'Alsace, déclarée judenrein par le Gauleiter Robert Wagner en .
  • Le territoire de Voïvodine, judenfrei le .
  • Le Luxembourg, judenfrei le [2].
  • L'Estonie, judenfrei en -.
  • La Serbie, judenfrei en .
  • Vienne, déclarée judenfrei par Alois Brunner le .
  • Berlin, judenrein le .
  • Thessalonique, judenrein en .
  • Erlangen (Allemagne), judenfrei en 1944.

Notes et références

  1. Die Welt, Heft 25, 23 juin 1899.
  2. Site du gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg.

Voir aussi

Bibliographie

  • Saul Friedländer, L’Allemagne nazie et les Juifs, éd. du Seuil, 1997, 2007 ; tome 1 : Les Années de persécution : L'Allemagne nazie et les Juifs, 1933-1939 ; tome 2 : Les Années d'extermination : L'Allemagne nazie et les Juifs : 1939-1945
  • Raul Hilberg, La Destruction des Juifs d'Europe, Gallimard, coll. « Folio histoire », 3 vol.  ; Exécuteurs, victimes, témoins, Gallimard, coll. « NRF »-essais, 1994 et « Folio »-histoire, 2004

Articles connexes

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